Wednesday, July 9, 2008

Débat sur les grands chantiers (Partie I)

Le premier ministre désigné devrait bientôt recevoir ou non l’aval de la chambre basse, je pense qu’il est temps de lancer les débats sur les multiples et pharaoniques chantiers qui attendent le premier ministre dans les semaines et mois à venir. Au cours de ce texte, je veux que vous reteniez le fait que tous les problèmes que confrontent la société haïtienne sont liés et qu’aucune solution ne pourrait être adressée en vase clos à un secteur d’activité donné.

Quels sont les grands chantiers qui attendent le futur premier ministre? Quelles sont les solutions possibles pour aborder et résoudre les problèmes de notre société de manière durable? Je vais essayer dans la mesure de mes capacités de placer le débat autour de ces questions.

Quels sont les grands chantiers nationaux?

Dans un pays en lambeaux comme le notre, choisir les grands chantiers n’est pas chose facile tant qu’il y a à construire, cependant, nous pouvons toujours choisir les priorités auxquelles s’attaquer. Quelles sont nos grandes priorités ? Cette liste non-exhaustive peut être considérée comme des urgences nationales par où tout gouvernement devrait commencer par :

  • La crise alimentaire
  • La crise énergétique
  • L’insécurité (banditisme)
  • L’éducation (rentrée des classes)
  • La corruption (contrebande – pratique mafieuse dans l’état et le privée – trafic d’influence)
  • Les problèmes de gouvernance et de gérance des institutions de l’état.

Ces quelques problèmes de la vie nationale que j’ai pu trier d’une liste longue et interminable de maux qui rongent la société haïtienne sont intimement liés les uns aux autres. Je vais essayer d’analyser chaque cas et d’ébaucher des solutions à ces problèmes. Je dois noter, au passage, que la recherche de solution à tout problème, doit poser les causes profondes du problème (ce que les américains appellent « The Root Cause ») au lieu de s’attaquer aux symptômes.

I – La crise alimentaire

La crise alimentaire est apparue dans l’actualité au cours du mois d’avril avec les spectaculaires émeutes de la faim qui ont sévèrement touchées la ville des Cayes et Port –au – Prince. Ce qu’on a passé sous silence c’est que la crise alimentaire est un problème de taille dans le pays depuis au moins 1992 (pendant la période de l’embargo et du coup d’état).

Quelles sont les causes de ce problème?

En commençant par les moins profondes au plus profondes des causes, je peux citer les éléments suivants :

1) La hausse des prix sur les marchés internationaux

2) La dépendance du pays aux produits alimentaires importés (Riz, haricot, mais, viande et autres)

3) Très peu ou absence d’intervention de l’état dans le secteur

4) Une agriculture rudimentaire et artisanale

5) Absence de crédit agricole

6) Zone irrigable non irriguée ou zone irriguée mal entretenue (rivière asséché à cause de la coupe des arbres sur les basins versants)

7) Système agraire inadéquate à la production de masse

8) Quasi absence d’élevage industriel ou même semi-industriel

Comment résoudre ces problèmes?

Réforme agraire et gestion des terres cultivables

Le point 7 de la liste des causes de la crise alimentaire peut être considéré comme l’une des racines du problème. L’agriculture nationale ne pourrait jamais se remettre sans une réforme agraire qui établira un système agraire qui peut supporter et encourager la production de masse capable de nourrir bientôt 10 millions de bouches. Une formule de réforme agraire devrait être trouvée dans le très court terme pour pouvoir mettre en valeur les terres agricoles dans les grandes plaines et les vallées du pays. D’un autre coté, il faut penser à geler les constructions en cours sur les terres cultivables et irrigables des plaines avoisinantes de nos grandes villes, comme la plaine du cul de sac, la plaine de Léogâne, la plaine des cayes et la plaine du Nord.

L’une des solutions pour la réforme agraire serait de créer des fermes agricoles qui seront gérées par des coopératives de petits agriculteurs. La terre ainsi que les moyens de production seraient dans ce cas la propriété de la coopérative en question. D’autres solutions sont aussi à imaginer et à implémenter pour résoudre le problème foncier qui reste une entrave majeure au développement de l’agriculture.

Créer et promouvoir des filières d’élevage industriel

Avec des moyens modestes, la filière d’aviculture peut rapidement prendre de l’essor et produire les produits avicoles que nous avons besoin pour la consommation locale. Qu’il s’agisse de poulets de chair ou de pondeuses, l’aménagement d’une ferme avicole ne demande pas beaucoup de temps et d’argent. Les élevages porcins, bovins doivent être aussi améliorés et des experts devraient étudier les possibilités d’une exploitation industrielle de ces filières.

Irrigation des zones irrigables et amélioration des systèmes d’irrigation existants

Il faut aménager des systèmes d’irrigation dans les plaines irrigables et restaurer les systèmes d’irrigation existants actuellement. Étant donné que certaines rivières (comme la rivière grise en plaine du cul de sac) sont presque à sec lors de la saison sèche, il faut agir sur deux axes pour garantir l’irrigation des plaines qui dépendent de ces rivières. Le premier, et c’est une urgence, il faut puiser l’eau de la nappe phréatique avec des pompes pour alimenter les systèmes d’irrigations; dans le même moment, il faut lancer une campagne de reboisement dans les bassins versants qui alimentent ces rivières pour permettre une stabilisation au niveau d’eau même en saison sèche.

Le problème de déboisement (voir de désertification) de nos montagnes ne peut pas être séparé du problème de faible production agricole. Je préconiserais un reboisement intelligent qui se fera dans une logique agro forestière, ou les arbres à planter seraient des arbres fruitiers : manguiers, avocatiers et autres suivant les régions et les terrains. Remplacer les cultures vivrières à flanc de montagnes par des plantations de manguier, d’avocatiers et d’agrumes (comme le citron, l’orange ou la pamplemousse) permettra aux paysans d’avoir accès à une source de revenus tout en protégeant l’environnement.

Crédit agricole

Réformer l’agriculture suppose la possibilité pour les agriculteurs d’avoir accès au crédit auprès des entreprises financières comme les banques ou les agences gouvernementales, restaurer la logique du crédit agricole dans le cadre d’un vaste plan de réforme et de relance de l’agriculture devrait être l’une des priorités du nouveau gouvernement. Le crédit agricole ne devrait pas être assimilé à de la charité faites aux paysans mais comme un support financier capable de générer de vraie entreprise agricole à travers le pays.

Moderniser l’agriculture

La modernisation de l’agriculture passe par sa mécanisation dans les grandes plaines (vallée de l’Artibonite - plaine du Nord – Plaine des Cayes – Plaine du cul de sac) et l’établissement de centres de recherche travaillant dans la recherche et la sélection de meilleure semence, la lutte contre les maladies. Permettre l’accès aux engrais, aux insecticides, aux herbicides pour ne plus être toujours tributaire de la nature pour faire une bonne récolte.

Il est clair que le ministère de l’agriculture aura un rôle clé dans la lutte pour résoudre la crise alimentaire. Si cette lutte est bien mené et des solutions fiable sont trouvé pour résoudre le problème alimentaire un foule d’autres problèmes seront résolu par la même occasion. Nous devrions voir les crises comme des opportunités pour résoudre des problèmes et explorer d’autres voies pour la résoudre une fois pour tout le problème de l’autosuffisance alimentaire du pays.

La partie II sera disponible bientôt.

Jean Came POULARD

Analyste Programmeur

3 comments:

Unknown said...

Vous avez effectivement dressé une liste des grands chantiers auxquels devrait s'atteler le premier ministre au plus tôt. Il est bien clair, qu'étant en ce moment en période de crise, la réussite d'au moins un des projets que vous citez amènerait un mieux allé dont la population haïtienne a besoin. Cependant, pour moi, toutes ces propositions se rapprochent d'une politique de gestion, comme appliquée à une entreprise en crise. Or je ne crois pas qu'Haiti soit une institution a sauver de la faillite. Je ne ressens dans votre discours aucun projet de société. Vous pouvez peut être garantir que tous les Haïtiens pourront, à l'avenir manger deux malangas au lieu d'un comme aujourd'hui, mais rien ne laisse pressentir que dans dix ans, nous aurons dépassé nos petits soucis de "nèg rayi nèg", que nous aurons enfin une société ou le fossé entre "classes sociales" sera comblé, et que nous serons toujours des Haïtiens fiers de leur histoire et de leur culture plutôt que l'état qu'il manquait aux américains pour compléter leur bannière étoilée.
J'attends.

Anonymous said...

J'ai pris beaucoup de plaisirs à lire votre analyse. Je nul doute que nos dirigents politiques disposent déjà de projets et plans similaires et peut etre plus perfectionnés que le votre. La question est donc, à mon humble avis, comment implémenter ces idées afin de transformer ce pays en un vaste chantier. Où trouver ces ressources indispensables à tout effort sérieux de développement? Remettre ce pays au travail doit être la priorité des priorités du prochain gouvernement et toute la question réside dans l'articulation et l'implémention des beaux plans, comme le votre, les sortir du tirroir et les mettre dans la rue.

Anonymous said...

J'ai pris beaucoup de plaisirs à lire votre analyse. J'ai nul doute que nos dirigents politiques disposent déjà de projets et plans similaires et peut etre plus perfectionnés que le votre. La question est donc, à mon humble avis, comment implémenter ces idées afin de transformer ce pays en un vaste chantier. Où trouver ces ressources indispensables à tout effort sérieux de développement? Remettre ce pays au travail doit être la priorité des priorités du prochain gouvernement et toute la question réside dans l'articulation et l'implémention de ces beaux plans les sortir du tirroir quoi et les convertir en action.